Reportages mariage : photographier moins pour photographier mieux

24 avril 2025

Dans le monde du mariage, certain·e·s photographes enchaînent les reportages mariage (voire les séances photo) à un rythme effréné, parfois plusieurs par semaine et pendant plusieurs semaines d’affilée. Si ce modèle peut sembler efficace et le plus rentable pour un professionnel qui souhaite assurer la pérennité de son activité, il ne me correspond absolument pas. Pour moi, chaque mariage mérite une attention particulière, un investissement émotionnel et artistique qui nécessitent une énergie et une créativité sans cesse à renouveler.

En faisant le choix de proposer des prestations premium et très individualisées tout au long de leur réalisation, je limite naturellement le nombre de mariages que je suis amenée à photographier chaque année (en marge des séances photo que je propose, j’ai placé ma jauge à 10 reportages en journée entière + quelques reportages de cérémonie civile/mi-journée en hors-saison -ou last minute si la période est plus calme-). Faire le choix de la qualité plutôt que la quantité a donc un impact direct sur mon rythme de travail mais forcément aussi sur l’expérience que je peux offrir aux couples qui me font confiance. C’est ce dont je souhaite parler aujourd’hui.

Prendre le temps d’apprendre à connaître chaque couple

Le process pour un reportage réussi, à mon sens, ne commence pas le jour du mariage. Il débute dès les premiers échanges puis se poursuit avec la rencontre (visio ou IRL) et bien sûr les préparatifs. Ces derniers me paraissent constituer le meilleur moment par lequel débuter un reportage mariage puisqu’ils m’immergent directement dans l’intimité du couple et, en quelque sorte, dans les coulisses de l’événement. Ils me permettent de me familiariser avec l’entourage des marié·e·s tout en me permettant de capter des souvenirs importants, dont l’adrénaline et l’émotion qui précèdent très souvent une cérémonie.

En acceptant moins de mariages, je peux m’investir davantage dans chacun et donc prendre le temps de connaître l’histoire de chaque couple, comprendre sa vision du mariage ainsi que les sensibilités et attentes de chaque personne et donc mieux préparer mon reportage. Mieux connaître les marié·e·s me permet d’avoir en tête leurs préférences et leurs goûts et parfois des anecdotes auxquelles je peux tâcher de donner un écho à travers la construction de mes photos. J’ai parfois utilisé des livres qui faisaient partie de la décoration d’un domaine pour photographier pendant les préparatifs les détails des tenues d’un couple passionné de littérature, ou encore réalisé davantage de photos de petits détails architecturaux d’un domaine car l’un des mariés avait une véritable passion pour les vieilles pierres et les lieux chargés d’histoire(s).  À la clé de cet investissement précieux, un reportage comportant des images forcément plus authentiques et naturelles !

mariage automnal style wes anderson

Une approche artisanale et soignée

Chaque reportage est pour moi un travail à personnaliser et soigner au maximum. Il ne s’agit pas d’enchaîner les images, mais de créer un récit cohérent, une collection de souvenirs qui aura du sens pour les personnes concernées et qui, pour les générations suivantes, témoignera d’une histoire (voire, à travers elle, d’une époque… pensez aux photos de nos grands-parents et arrières grands-parents et à ce qu’elles racontent d’eux, de leurs usages et de leur vie). 

Après chaque mariage, j’aime consacrer du temps au tri et à la retouche, sans précipitation, pour travailler chaque photo avec minutie. J’ai beau avoir conscience que l’époque est à l’utilisation de l’IA pour l’automatisation du tri et du post-traitement des images et faire gagner un temps considérable, je suis réfractaire à l’employer dans ce but à la fois en raison de mes convictions écologiques et de ma conscience professionnelle. Une IA, même bien entraînée, ne remplacera jamais l’œil aguerri d’un(e) photographe et surtout sa sensibilité et l’état émotionnel lié à chaque reportage. Je soigne chaque détail et adapte parfois légèrement ma colorimétrie pour qu’elle s’adapte mieux à un contexte précis, afin de toujours proposer un reportage homogène et intemporel. Je veux que chaque couple se sente unique, pas un mariage parmi tant d’autres au cours d’une saison : la minutie et l’attention que je lui accorde tout au long de cette étape demandent aussi du temps et de la rigueur.

mariage chic montpellier

Préserver mon inspiration et mon énergie

Si être photographe est un métier qui comporte de nombreux avantages -dont être chez soi une grande partie du temps-, c’est aussi un métier exigeant qui peut drainer physiquement (sur les mariages, notamment) voire émotionnellement. La concentration et la sociabilité intenses qu’il demande peuvent rapidement épuiser : ça ne m’empêche absolument pas d’adorer être photographe (sinon je ferais autre chose), mais j’ai dû apprendre au fil des années à me préserver.

J’ai pu constater par moi-même les premières années qu’enchaîner les reportages nuit à ma créativité et à ma capacité à être pleinement présente et disponible pour chaque couple (et je ne pense pas être la seule photographe à ressentir ça). Choisir de photographier moins de séances et mariage et donc limiter de fait mon agenda me permet de rester à la fois inspirée et passionnée : ma “vibe artistique” étant ce que j’offre avant tout à travers mes reportages, il est primordial que ma jauge de créativité soit au maximum.

Au fil des années, j’ai aussi appris à dire non aux projets avec lesquels je ne me sentais pas alignée. Ce n’est pas simple à faire quand on est indépendante, a fortiori quand on aime ce que l’on fait et qu’on souhaite en vivre pleinement. L’expérience m’a cependant montré que c’est parfois nécessaire car un projet (ou un·e client·e peu respectueux·se, ça peut arriver aussi) qui entraîne une baisse d’énergie, de motivation et de créativité aura des répercussions sur les autres projets en cours ou à venir… Tout accepter n’est donc pas se respecter et encore moins respecter les clients. 

Les premières années, comme tout entrepreneur(e) débutant(e), j’avais l’impression qu’en travaillant non-stop, je proposerais un service plus pro et plus dévoué à mes clients, que c’était la seule garantie du succès et que je n’y arriverais pas si je n’étais pas focus à 100% sur mon entreprise. Lorsqu’on débute, il y a de nombreuses choses à penser et process à mettre en place, beaucoup d’aspects sur lesquels se former et/ou à améliorer, j’avais donc toujours quelque chose de plus pertinent à faire que de prendre du temps pour moi et je culpabilisais dès que j’osais faire autre chose. L’été dernier, j’ai ressenti le besoin de ralentir. Comme j’avais réussi à atteindre une certaine efficacité de travail (à force d’expérience et aussi en optimisant mon organisation et mon matériel, notamment informatique), je me suis autorisée à m’accorder du temps pour moi et à le consacrer à diverses activités (lecture, guitare, dessin, sport et plus récemment jonglage). J’ai ressenti très vite les effets positifs du retour à un rythme plus décent : moins de fatigue évidemment, mais aussi diminution de mon anxiété, meilleure concentration, meilleure forme physique et créativité largement décuplée. J’ai donc choisi d’augmenter mon temps de livraison maximum de 4 à 6 semaines pour les mariages : je livre souvent aux alentours de 3 à 4 semaines mais la marge qu’il reste me permet, en cas de surcharge de travail, de ne pas lui sacrifier mon temps de sommeil ni mes soirées. 

photographe cérémonie civile montpellier

Offrir une expérience à la hauteur des attentes

Consciente que les couples qui me choisissent ne veulent pas simplement des photos mais également une expérience agréable à mes côtés, je fais mon possible pour leur proposer, en plus de mon regard, un véritable accompagnement et des services de qualité.

En travaillant sur un nombre limité de mariages, je suis tout d’abord davantage à même de réaliser cet accompagnement non seulement pendant leur jour J mais également en amont et en aval. Il m’est arrivé plusieurs fois, et encore actuellement d’ailleurs, d’être en lien deux ans après avec des mariés ou jeunes parents pour le choix de tirages ou d’albums. J’aime tisser un lien particulier avec mes couples de marié·e·s et je suis restée en contact avec plusieurs d’entre eux au fil des années (en étant d’ailleurs témoin, pour certains, de l’agrandissement de leur famille !).

Autre obligation que je me donne et qu’accepter un nombre raisonnable de mariages me permet de réaliser : je mets un point d’honneur à livrer un reportage dans le temps indiqué (le plus rapidement que je puisse le faire sans sacrifier la qualité de celui-ci ni ma santé). Je m’astreins à le faire car pour m’être mariée moi-même, j’ai bien conscience de l’attente que cela représente et de l’envie des marié(e)s de partager la bonne nouvelle avec les proches absents. Ces photos pouvant également servir pour les cartes de remerciement envoyées aux invités après le jour J, délivrer mon reportage plus de deux mois aurait moins de sens. On retrouve d’ailleurs un peu la même chose avec un reportage nouveau-né et la perspective de faire-part de naissance.

En ce qui concerne les produits physiques, je prends évidemment le temps de vérifier les commandes passées auprès de mes fournisseurs et de réaliser un joli packaging (avec souvent un petit élément fait main et au moins une petite surprise à l’intérieur). Étant passionnée de papeterie et sensible au graphisme, c’est un point que j’ai veillé à soigner dès le début car j’adore, pour ma part, recevoir de jolis colis ! Le temps nécessaire pour préparer et réaliser ces envois est parfois difficile à trouver dans les grosses périodes dédiées au post-traitement (notamment en plein pic de la saison de mariages) mais je n’y déroge jamais car cela fait à mon sens pleinement partie de la qualité de service que je propose. 


En résumé, privilégier la qualité à la quantité est quelque chose de précieux autant pour moi, dans l’objectif de rester fidèle à ma vision de la photographie, que pour les couples que j’accompagne, afin de proposer un travail sincère et authentique. En écrivant cet article, j’ai réalisé que cette démarche pourrait s’approcher un peu de celle de la slow photo, dans laquelle j’ai un peu plongé (au départ inconsciemment) depuis quelques années maintenant, notamment grâce à ma pratique personnelle argentique qui m’a incitée à beaucoup ralentir.

fanny poesie boheme

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Fanny DUPUIS

photographe mariage & maternité à Montpellier,

en Provence et partout en France